J’ai longtemps été un bon petit soldat : les jours de blues, j’ai souvent pris la direction des boutiques en quête de nouveautés, en quête du truc magnifique capable de magnifier mon intérieur, ma penderie, ma vie.

Mais voilà, un jour je me suis rendue compte que je ne savais plus pourquoi je courrais. Travailler, gagner des sous, consommer, travailler, gagner des sous, acheter… Un jour, j’ai perdu la foi, j’ai arrêté de courir et l’argent a commencé à manquer.

Il paraît que l’homme progresse face à l’adversité. C’est peut-être vrai. Mon adversité à moi : je n’ai plus ni les moyens, ni l’envie de noyer mon blues dans les boutiques. Au début, la télévision a pris le relai : blues = légume devant la télévision (oui, je sais, c’est moche  !). Et puis ça m’est venu.

J’étais là, je tournais en rond - chez moi - comme un lion en cage, et ça n’allait pas, cet intérieur n’allait pas : trop petit, trop sombre, trop vieux, trop ébréché, trop usé, trop plein, trop… et comme je ne pouvais plus acheter du beau pour recouvrir le moche, je me suis mise à éliminer le moche, par cartons entiers.

Voilà comment - dans ma quête du toujours mieux - j’ai basculé du mode toujours plus, au mode toujours moins.

Voilà comment, aussi, l’insoupçonnable est apparu : chaque inutile qui sort emporte avec lui quelques idées noires et un petit bout de brouillard. Mes idées s’éclaircissent et la réponse à « pourquoi je cours, ou plutôt après quoi je cours ? » devient plus claire.

Pour le moment je n’ose pas trop, mais je vous raconterai… au fil du temps.(Savoir et admettre… j’ai toujours eu besoin de temps pour passer de l’un à l’autre… )