1- Principe de base : le détergent

Toutes les lessives en contiennent. C’est LA base de tout nettoyage.

Petit rappel rapide sur leur action :

Les détergents au sens strict sont des tensioactifs (ou agents de surface, surfactants, détersifs) qui modifient la tension superficielle de l’eau. (Une paille posée sur l’eau flotte. Si l’eau contient un détergent, la paille coule.) Les détergents permettent ainsi à l’eau de mouiller les salissures et de les évacuer au rinçage.

Comment ?

Les molécules de détergent présentent deux extrémités:

  • une tête lipophile (qui aime la graisse, mais déteste l’eau),
  • une tête hydrophile (qui aime l’eau, mais déteste la graisse).

En présence d’eau sale, ces molécules vont venir isoler la graisse de l’eau en se plaçant entre les deux, tête hydrophile côté eau et tête lipophile côté graisse (ou en surface, côté air).

Et si cette graisse se trouve sur une surface quelconque (tissu, peau, carrelage, émail etc.), l’action de ces molécules va venir fragiliser la liaison entre la surface et la graisse, jusqu’à la détacher totalement.

2- Lessive généraliste, formule blancheur, formule spéciale couleurs, linge délicat… ? Ce qui change d’une lessive à l’autre.

Le nettoyage d’un tissu pose différents problèmes qui lui sont spécifiques :

  1. les salissures sont souvent très bien accrochées au tissu (voir « incrustées » dans le tissu),
  2. un tissu, par définition est fragile ; il est donc délicat de l’exposer à de très hautes températures, à des frictions excessives ou à des détergents très agressifs.

Les lessives actuelles utilisent donc des agents annexes qui aident le détergent à faire son boulot. Ils se divisent en deux groupes principaux : les enzymes et les agents de blancheur, présents ou non selon le type de lessive.

*** Les enzymes

Elles sont généralement présentes dans les lessives généralistes - liquides ou en poudre - et les lessives « couleurs ».

Utilisées depuis les années 1960, ces enzymes s’attaquent aux salissures organiques : thé, café, tomate, sang… en les fragmentant, elles les rendent plus « attaquables » par les détergents.

Leur activité est maximale à 40°C et elles deviennent inactives au delà de 60°C. Leur présence n’a donc d’intérêt que pour les lavages à températures réduites.

Notez aussi qu’il vaut mieux éviter de laver la laine et la soie avec une lessive contenant des enzymes, parce que ces matières sont elles aussi attaquées par les enzymes. De la même façon, plumes et duvets y réagissent assez mal. D’où l’existence de lessives dépourvues d’enzymes dédiées au « linge délicat ».

Les problèmes que peuvent poser les enzymes :

(À prendre avec des pincettes ; je n’ai trouvé aucune étude sérieuse venant confirmer ses affirmations.)

  • les enzymes utilisées dans les lessives ordinaires auraient tendance à se fixer sur les tissus. Résultat : elles ne seraient pas toutes éliminées au rinçage. Or, ils semblerait qu’elles présentent des risques d’allergie.
  • les enzymes sont apparemment bien éliminées par les stations d’épuration… cependant, il semblerait que leur production implique une culture massive de champignons génétiquement modifiés. Or, après extraction des enzymes, ces champignons sont « cuits » (afin de tuer les micro-organismes résiduels) puis utilisés comme engrais dans l’agriculture… ce qui présente quelques incertitudes concernant la possible transmission des gènes modifiés vers notre environnement.

Dans les lessives écologiques :

Certaines lessives écologiques contiennent elles aussi des enzymes parce que leur propriété « efficaces à basse température » est difficilement remplaçable… mais les fabricants s’appliquent à utiliser des enzymes « non modifiées » qui auraient moins la propriété de se fixer sur le linge (ce qui les rendraient moins allergènes, mais aussi légèrement moins efficaces que les autres… ).

*** Les agents de blancheur

Ils sont présents dans les lessives généralistes - en poudre uniquement pour l’oxygène actif - et dans les formules blanchissantes.

- l’oxygène actif

Les fameuses lessives à l’oxygène actif sont en réalité des lessives qui libèrent de l’eau oxygénée durant le lavage.

On obtient ainsi des lessives qui possèdent un fort pouvoir oxydant, et donc des propriétés blanchissantes et désinfectantes, tout en restant très écologiques car l’eau oxygénée ne libère dans l’environnement que de l’oxygène et de l’eau.

Les problèmes que pose l’oxygène actif :

L’eau oxygénée est difficile à utiliser telle quelle pour des raisons d’instabilité et de coût financier. Dans les lessives, elle est donc remplacée par des produits capables de libérer de l’eau oxygénée : du perborate de soude (ou de sodium) ou du percarbonate de soude (ou de sodium).

Or, l’usage massif du premier - le perborate de sodium - pose des problèmes environnementaux parce qu’il surcharge l’environnement en élément bore qui à haute dose devient toxique pour les plantes.

De plus, utilisés purs, l’un comme l’autre ne libèrent vraiment de l’eau oxygénée qu’à partir de 60°C. Pour une efficacité à basse température, les fabricants de lessive ajoutent donc des activateurs de décomposition : TAED, pentaacétylglucose… des produits complexants hautement toxiques, très peu biodégradables et très mal éliminés par les usines de traitement des eaux usées.

Notez qu’une alternative basse température aux perborates existe : il s’agit de l’hypochlorite, autrement dit l’eau de javel… pire encore pour l’environnement !

Dans les lessives écologiques :

- De nombreuses lessives écologiques (en poudre !) utilisent elles aussi des agents de blanchiment oxygénés (du percarbonate de sodium le plus souvent) associés à des activateurs.

- Les marques écologiques ont surtout tendance à vendre du blanchissant en poudre (du percarbonate de sodium pur, en général) et à en recommander l’usage pour des lessives de blanc effectuées à chaud exclusivement…

- Les azurants optiques

Certaines lessives sont riches en azurants optiques qui ont pour fonction de rendre le linge plus blanc que blanc (légèrement bleuté, en vrai).

Non biodégradables, ils sont totalement exclus des lessives écologiques.

Les azurants optiques et l’environnement :

En réalité, les études semblent indiquer que les azurants optiques - s’ils ne sont pas biodégradables - sont photodégradables : ils sont peu stables dans l’environnement en présence de lumière solaire et d’eau. Une partie des azurants optiques rejetée dans les cours d’eau est donc détruite. Reste la part qui arrive à se déposer au fond des cours d’eau, qui elle n’aura plus l’occasion de se dégrader.

De plus il semblerait que les rejets d’azurants optiques dus à nos lessives soient minimes (contrairement aux rejets dus aux usines de papiers, plastiques, textiles… ), et en grande partie retenue par les stations d’épuration. Traduisez : on les retrouve ensuite dans les boues d’épuration qui sont ensuite utilisées dans l’agriculture (épandage)… quand tout à l’égout et station d’épuration il y a !

Enfin, il semble qu’aucune étude sérieuse ne se soit jamais intéressée à l’impact de ces azurants optiques qui s’accumulent dans les sédiments et dans les sols.

Petite astuce de remplacement vue chez Raffa : « Personnellement, pour la lessive de blanc, je les remplace par 8 gtes d’encre bleue (encre pour stylo plume : bleu de méthylène) dans le bac adoucissant avec le vinaigre. On peut aussi les remplacer par 1/6 de craie bleue d’écolier (lu sur un forum canadien, pas testé). »

3- Poudre ou liquide ?

*** Les lessives en poudre

Les inconvénients des formules en poudre :

  • Lors de lavage à 30°C, elles sont susceptibles de laisser des traces de poudres non dissoutes sur les vêtements.
  • Les lessives en poudre - à l’exception des lessives « couleurs » - contiennent toutes un agent blanchissant oxygéné, associé à un activateur.
    • Or cet activateur est - comme nous l’avons vu - un composant toxique, néfaste pour l’environnement et mal retraité par les usines de retraitement des eaux usées.
    • Cette action blanchissante peut à la longue affadir les couleurs des vêtements.
  • Parfois, les lessives en poudre contiennent aussi des zéolites, qui sont utilisés comme anti-calcaire. [Ils remplacent les phosphates qui sont interdits dans les lessives, en France, depuis le 1er juillet 2007, parce qu’ils sont à l’origine d’un phénomène d’eutrophisation (asphyxie) des sols et des points d’eau.] [Quand il n’y a pas de zéolites, souvent il y a des phosphonates, qui ont des conséquences semblables à celles des phosphates.] Ces zéolites, en eux-mêmes, ne semblent pas poser de problèmes. Mais leur emploi appelle souvent l’utilisation de coadjuvants néfastes pour l’environnement tels que des polycarboxylates.
  • Enfin, selon L’Institut National de la Consommation (INC - 2006), il semblerait que toutes les lessives en poudre présentent des effluents difficiles à dégrader. Cependant, des questions subsistent sur la nature de leur fraction non dégradable.

Les avantages des formules en poudre :

  • Elles contiennent beaucoup moins de tensio-actifs que les formules liquides et sont dépourvues de conservateurs et d’agents de texture.

*** Les lessives liquides

Les inconvénients des formules liquides :

  • Afin de présenter « une viscosité agréable » pour le consommateur, les lessives liquides contiennent des épaississants et des agents liquéfiants et solubilisants. Des produits potentiellement allergènes et polluants.
  • La forme liquide entraine - par définition - une sensibilité accrue au développement de micro-organismes. Du coup, les lessives liquides intègrent des conservateurs biocides.
  • Enfin, il est actuellement impossible d’introduire un agent de blanchiment dans une formule contenant de l’eau. Le couple « agent de blanchiment oxygéné + activateur d’agent de blanchiment » est donc absent des formules de lessives liquides. Le problème étant que l’agent blanchissant des lessives en poudre joue aussi un rôle anti-calcaire ; calcaire qui réagit avec les tensioactifs pour former des flocons gras appelés « savon calcaire », réduisant d’autant la part de tensioactifs disponibles pour la lessive. Résultat, les lessives liquides contiennent et rejettent trois fois plus de tensioactifs dans les eaux usées qu’une lessive en poudre.

Les avantages des formules liquides

  • En contre-partie, les lessives liquides présentent une meilleure solubilité. Une caractéristique qui les rends plus efficaces à basse température. De plus, leur mise en solution quasi immédiate permet à leurs divers ingrédients d’entrer en action dès le début du cycle de lavage. Ce qui les rends également plus adaptées aux lavages en cycles courts.
  • Les lessives liquides peuvent être appliquées directement sur les taches en guise de détachage / prélavage.
  • Dans les formules liquides, les zéolites sont souvent remplacées par des citrates qui n’impliquent pas l’utilisation de coadjuvants. En contre-partie leur pouvoir anti-calcaire est nettement plus faible que celui des zéolites et décroît avec l‘augmentation de la température de lavage. [Ou alors, on retrouve là encore des phosphonates et leur tendance à l’asphyxie des sols et des points d’eau.]

4- Récapitulatif

détergent enzymes agents de blancheur et activateur
lessives généralistes x x x
formules spéciales blancheur parfois. 

Dépend si c’est un « additif » ou un « tout en un »

parfois x
lessives « couleurs » x x
linge délicat x
lessive liquide x parfois

5- Et donc… quelle lessive choisir ?

Les études réalisées sur le sujet indiquent clairement que les lessives dépourvues d’agents blanchissants (et activateurs) sont bien moins néfastes pour l’environnement.

Mon premier conseil serait donc de limiter l’utilisation de formules incluant des agents blanchissants aux lessives de « blanc » uniquement.

Le blanc ?

Les tissus résistants, en coton, lin, chanvre… blancs, de couleurs pastelles ou « grand teint » et/ou le linge dont l’usage en fait un terrain particulièrement propice à un développement bactérien. Autrement dit : les draps, les torchons, les bavoirs, les serviettes et gants de toilette, les protèges slips et mouchoirs en tissus, les bleus de travail, les culottes et caleçons…

Notez, tout de même, que tout ce « blanc » n’a pas nécessairement besoin d’être blanchit / désinfecter à chaque lavage. Une alternance lessive ordinaire / lessive blanchissante-désinfectante peut suffire…

Malgré tout, je dirais que tout dépend de votre situation et de vos habitudes.

a- Dans la majorité des cas - et plus encore en présence d’enfants ou de vêtements de travail particulièrement crado - l’option la plus adaptée me semble être la suivant :

  • lessive liquide pour le linge courant (utilisation à 30 ou 40°C, avec possibilité de se contenter d’un cycle court) (ou lessive en poudre « couleurs », mais uniquement en cycle normal),
  • puis, au choix, pour le blanc  :
    • votre lessive habituelle (liquide ou couleurs) + du percarbonate de sodium (blanchissant-désinfectant) (et anti-calcaire !) (pleinement efficace à 60°C parce que du coup on se retrouve avec une lessive dépourvue d’activateur)
    • ou une lessive généraliste (en poudre !) (qui contient blanchissant-désinfectant + activateur - donc pleinement efficace dès 30 ou 40°C) (et à laquelle on peut encore ajouter une dose du percarbonate de sodium si on trouve que ça ne blanchit pas assez… )

Le percarbonate de soude (ou de sodium)

De formule 2Na2CO3.3h2O2, c’est un blanchissant à oxygène actif pleinement efficace à 60°C (mais dont l’action commence à partir de 40°C). Son innocuité le rend de plus en plus courant dans l’industrie des lessives.

=> Dose recommandée, pour une machine pleine de 4 à 5 kg (1 cuillère à soupe équivaut à 15 ml) :

  • pour le blanc: 1 cuillère à soupe
  • pour éliminer les taches colorées : 2 cuillères à soupe
  • pour le lavage à la main ou le trempage : 1 cuillère à soupe

b- Si, par contre, vous vivez seul, que vous faites une lessive par semaine, pas plus (parce que pas la peine) pas moins (parce que pas plus de fringues que ça), que vous ne triez pas votre linge avant de le mettre en machine… alors je pense que la bonne option reste la lessive généraliste en poudre, qui est pensée pour être le meilleur compromis possible dans le cadre d’un « je lave tout, ensemble, à 30°C ou 40°C, sans chercher plus loin ». Plus simple et beaucoup plus écolo que de faire plusieurs lessives en demi-charges avec différents types de formules.

Pour aller plus loin :

Documents à consulter sur le Web :